Manuela Lalic
PRATIQUE ARTISTIQUE
La phrase cliché « Ça, moi aussi je peux le faire », entendue d’une personne critiquant l’art actuel, a marqué la stratégie du faire de Manuela Lalic. Ainsi, pour que chacun puisse s’identifier à l’acte artistique, son travail passe par des gestes simples qu’elle pose sur des matériaux et objets "pauvres" (tordre un trombone, faire un nœud dans un sac de plastique). En construisant une matérialité en ambivalence entre ce qui est artificiel et naturel, l’instable, le périssable, le dégradé (le sale) se juxtapose au raffiné, au détaillé, au séduisant. À partir de la manipulation d'objets et/ou d’images et des accumulations qui en découlent, Manuela Lalic élabore des mises en scène évoquant des "moments collectifs" en détournant les gestes, les objets, l’organisation de l’espace associés à ces rituels et conventions, à ces manières "d’être ensemble ».—L’artiste s’intéresse aux comportements de masse pour questionner le fonctionnement de la société capitaliste qui préfabrique et standardise nos désirs et nos besoins. Dans cette logique, la performance est de l’ordre de l’infiltration dans des mouvements de masse (prolonger la ligne rouge signalétique de l’abribus avec un ruban rouge, le couper, aller d’un abri-bus à l’autre et reconstruire ce trajet en une ligne rouge sur la carte de Montréal; tracer le contour de dépôts de chewing-gums s’accumulant sur les trottoirs à New York). En observant les tensions entre ses différents états identitaires de franco-serbe-canadienne, lesquels sont également liés à des appartenances rurales, urbaines ou cosmopolites, Manuela Lalic s’interroge sur le lien reliant l’individu à sa collectivité, thème récurrent dans sa pratique. Le sentiment d’appartenance avec l’attachement à son pays natal et à ses racines intéresse l’artiste tout autant que la part de détermination et de contrôle que l’on peut en avoir. Dans ce sens, comme sculpteure et performeuse, Manuela Lalic s’engage dans une position d’observatrice : elle choisit ce qu’elle relativise, valorise, caricature en se positionnant face à ces multiples appartenances culturelles.
Le travail de Manuela Lalic a été présenté au Canada, aux États-Unis, en Europe, en Asie et en Afrique. Ses partis pris artistiques l’ont menée à faire plusieurs résidences à l’international notamment à New York (résidence du Conseil des Arts du Canada-International Studio and Curatorial Program, 2009), au Rajasthan, en Inde (Sandarbh Artist Residency, 2013/2014) et à Yaoundé, Cameroun (courte résidence dans le cadre de la Biennale Ravy, 2016). Depuis 2014, Manuela Lalic est chargée de cours à l’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM.
lalicmanuela.ca