Poor Peril

JUSTIN STEPHENS

Poor Peril

  • Exposition
© Justin Stephens, Galerie B-312, 2008.
23 février 2008 au 29 mars 2008

—VERNISSAGE SAMEDI 23 FÉVRIER À 15H

La Galerie B-312 est heureuse d’accueillir dans sa petite salle Poor Peril, une exposition du peintre Justin Stephens. Nous n’y verrons pas de tableaux cependant, mais des masses informes en cire réalisées à force d’avoir laissé un nombre incalculable de bougies se consumer et fondre, sur une petite plaque de bois d’abord, sur un amoncellement de cire ensuite ; des lacets de chaussure multicolores appuyés au mur, parce qu’ils tiennent miraculeusement droit ; des rouleaux de ruban-cache qui a déjà servi ; des bouchons d’oreilles en mousse plantés dans le mur.—Pas besoin de savoir-faire particulier pour confectionner de tels objets. Mais combien d’heures pour qu’autant de bougies se consument ? Combien de tableaux peints pour constituer ces rouleaux de rubans gonflés de peinture ? Combien de patience pour insérer un fil métallique dans des lacets pour qu’ils puissent conserver la forme qu’on souhaite leur donner ?—Tout ce temps « perdu » à ne pas peindre.—Et si ce temps « perdu » était à perdre ? Justin Stephens faisant ce qu’il fait en attendant de peindre, ou le faisant à temps perdu, entre deux tableaux, comme s’il s’agissait de prendre l’empreinte de ce temps en trop. D’un autre côté, ce temps en excès, dont l’artiste dresse en quelque sorte des figures, est aussi le temps qu’il faut, le temps dont l’artiste a besoin, pour réaliser des figures du temps. Tout entre alors dans l’ordre : le temps en trop devient le temps qu’il faut pour représenter le temps, mais à condition d’apparaître comme du temps perdu.—C’est l’immense dossier de la forme que Justin Stephens se trouve à ouvrir alors.—« Donner une forme », n’est-ce pas la préoccupation première de l’artiste ? Se donne-t-elle d’elle-même comme dans ces blocs de cire ? Dépend-elle au contraire de la main qui la façonne comme dans ces lacets, qui, contre toute attente, auront la forme que l’artiste leur donnera ? Se déduit-elle d’une matrice, tels un moule ou un système de cache, comme l’évoque le ruban adhésif gonflé de peinture ? Ici, le rouleau retourne au rouleau. Est-ce dire qu’une forme est aussi l’expression, ou l’écho, d’une origine ? La forme suppose-t-elle une origine dont elle est induite ?—Cette fois, c’est le dossier, encore plus immense, de l’origine que Justin Stephens se trouve à ouvrir. 

—JEAN-ÉMILE VERDIER